Déporté à l’âge de 9 ans, la tragédie de Manuel Kirkyacharian débute en 1915 en Cilicie (Adana, en Turquie) et s’achève dix ans plus tard à Alep. Après les massacres, avoir subi les exactions des villageois tcherkesses, il perd ses parents, est vendu tel un esclave, s’enfuit… Mais sa survie, en dépit des exactions qui continuent, il la trouvera parmi les villages kurdes et syriaques en Haute-Mésopotamie et n’aura de cesse de retrouver les siens. C’est sous l’angle civil que ce récit nous est présenté où des populations en massacrent d’autres. Des cartes en fin d’ouvrage ainsi que les documents, les photographies, un glossaire, une généalogie témoignent également de ces événements. Terrible massacre donc, mais si on s’attend à ce que le souvenir de ces souffrances s’accompagne de cris de colère et de cris de vengeance, il n’en est rien. Au-delà du témoignage rare, on est frappé par la sobriété du récit, ainsi que la détermination inébranlable de cet enfant à retrouver les siens. Un récit unique donc, des mots simples, le quotidien d’un enfant pris dans l’Histoire, parce que, malgré tout, la vie est toujours la plus forte. Enregistrés sur magnétophone, transcrits ensuite en turc, annotés et préfacés par Baskin Oran, les souvenirs de cette enfance tragique sont aujourd’hui traduits en français.
Baskin Oran a dédié ce livre à son ami journaliste arménien, Hrant Dink, qui a été assassiné à Istanbul en 2007.
Baskin Oran est une figure de proue de la société civile en Turquie. Professeur en sciences politiques, intellectuel engagé, il écrit pour plusieurs titres de la presse turque.
Il a également publié de nombreux ouvrages et articles concernant les relations internationales, les nationalismes et les droits des minorités.
4e couverture
« J’aurais dû mourir à l’âge de neuf ans.
Cette vie, je ne la dois qu’à la grâce de Dieu. »
Telles furent les dernières paroles de Manuel Kirkyacharian. Adana. Sud de la Turquie. 1915. Il a neuf ans. Déporté comme des centaines de milliers d’Arméniens, il perd son père, sa mère, une partie de son entourage. Il est vendu, échangé.
Quasiment parvenu au terme de sa vie, il décide de consigner, sur bandes magnétiques, les souvenirs de cette enfance tragique : le bain de sang, les fuites successives pour échapper à ceux qui l’ont « adopté » et cette errance de dix ans achevée à Alep où il retrouvera ceux de ses proches restés en vie. Paroles quasi indicibles, et pourtant paroles dites, en turc, langue qu’il connaît le mieux.
La force de ce récit réside bien sûr dans l’atrocité des événements que vécurent Manuel Kirkyacharian et les siens. Mais elle tient également à l’attitude si particulière adoptée par le narrateur.
Il raconte tout simplement sans jamais se mettre en avant, en se dissimulant presque derrière ces deux initiales, « M.K. ». Il narre sans pathos et sans haine. Il a su pardonner et trouver des remèdes aux cauchemars qui le hanteront tout au long de sa vie.
Un récit en cela unique et captivant, empreint d’une véritable émotion. Un témoignage exceptionnel sur ce terrible massacre.
Baskin Oran a dédié ce livre à son ami journaliste arménien, Hrant Dink, qui a été assassiné à Istanbul en 2007.